Journal d'une victime de la guerre

4/11/202317 min read

20/07/2015

C’est le début du printemps on dirait, les arbres se gorgent des bourgeons et les oiseaux reviennent. Après cet hiver difficile, on avait bien besoin d’un peu d’air frais. L’écoulement du temps couplé à la météo a grandement détérioré mon allée, mais la mairie m’a assuré que les trous seraient bientôt résorbés. J’espère qu’ils disent vrai. Quand je me rends au tribunal, j’en ai marre de renverser mon café. Il faut que je pense à acheter des croquettes pour Félix. Ce foutu cahier me servira au moins de post-it. « Mais oui monsieur, vous verrez ça vous détendra d’écrire vos pensées dans ce cahier. Promettez-moi d’essayer » foutu doc, payer si cher pour tant d’ineptie. En plus de ça, je dois aller aider Joe à réparer sa clôture, des gosses l’ont encore bousillé.

23/07/2015

Félix n’a pas l’air d’aimer ses nouvelles croquettes. Vu l’odeur, je ne peux pas vraiment lui en vouloir. Je m’ennuie en ce moment. Les seules affaires que j’ai en ce moment sont des petites histoires d’étrangers qui ont fui la guerre et on décider de braver l’interdiction de passer la frontière. C’est un peu dur, mais nous sommes obligés de les repousser pour garantir notre neutralité. Il paraît que le conflit s’intensifie, les chaînes de TV, qui avait abandonné ce sujet puisque le public finit toujours par s’habituer à l’horreur, se jettent sur les dernières infos en provenance du front. Je sais bien que ça ne nous concerne pas, mais toutes les horreurs dont nous les médias nous abreuvent me rendent nerveux. Hier, j’ai repris un cachet pour mieux dormir. Il faut vraiment que j’arrête d’en prendre, mais ma vie est moins dure quand je les prends.

25/07/2015

Une centrale nucléaire pas très loin du front a été touché par un missile hier, personne n’a été blessé vu qu’elle était à l’arrêt depuis longtemps. Cependant, le choc a fait exploser la centrale, libérant de la radioactivité dans les zones environnantes. Bien que l’incident ait eu lieu assez loin, on nous à distribuer des cachets de potassium pour nous prémunir. Ça m’a mis les nerfs en pelote. J’étais tellement distrait par les événements que j’ai failli écraser un gosse à vélo en allant au boulot. Je crois que j’ai besoin de boire une bière avec Joe pour décompresser un peu.

01/08/2015

La situation commence à dégénérer ici. Avec notre voisin qui perd la guerre, la menace d’une invasion ennemie est imminente. Beaucoup de gens ont fui la ville pour se réfugier plus au nord. Je suis inquiet et en colère. Inquiet car la guerre semble de plus en plus plausible, et en colère parce que je ne peux m’empêcher de manger mes cachets comme des foutus bonbons. J’ai l’impression que même Félix est stressé, je trouve des touffes de poils de plus en plus grande dans la maison. J’ai planté un petit potager afin de me distraire, je crois que ça marche un petit peu, à moins que ce ne soit l’effet des pilules. Écrire aussi me fait du bien, j’ai jugé un peu vite l’initiative du doc.

04/08/2015

La nouvel est paru ce matin, des troupe ennemies se dirigent vers nous. C’est une question de temps avant que nous ne soyons en guerre. Au boulot, j’ai appris que l’ordre de mobilisation était donné. Les hommes en état de se battre devront se rendre à la mairie (transformée en centre de formation pour l’occasion). J’ai fait en sorte qu’il raye mon nom ainsi que celui de Joe. Les départs ont fait fortement décroître la démographie de la ville, il ne reste qu’un tiers des habitants. Le vieux supermarché a été transformé en centre de ravitaillement (officiellement, il est fermé pour rénovation pour l’instant.) De plus, j’ai été informé que des soldats alliés ont formé un petit camp dans la forêt environnante. Au moins, j’ai pu récupérer des croquettes pour Félix.

06/08/2015

Les troupes quasiment toutes parties en direction de la frontière. Il parait que nous n’avons quasiment perdu aucun homme. C’est difficile à dire en réalité, car les médias ont tous été requestionné par le gouvernement. Il ne diffuse que de la propagande guerrière. Jusqu’à ce matin, les effets de la guerre ne se faisaient sentir que par la pénurie de certaines denrées superflues. Mais ce matin, un sifflement aigue brisa le silence des foyers et la cohue de la rue, un bombardier a attaqué notre hôpital. Il y a eu 110 morts. Toute porte à croire que ce n'est que le début, nous devons nous préparer à d’autres bombardements. J’ai commencé à aménager ma cave et à faire des réserves de denrées non-périssables. J’espère de tout mon cœur que je m’affole pour rien. Je commence à avoir des pousses dans mon potager, j’essaye de me concentrer dessus pour ne pas penser à tout ça. Ma thérapie agricole ne marche pas aussi bien que je ne l’espérai, j’ai repris un cachet hier.

10/08/2015

Ça y est, la guerre est déclarée. Plusieurs jours se sont écoulés depuis le début des affrontements, mais c’est officiellement aujourd’hui qu’elle est déclarée. La ville s’est encore plus vidée, à croire que certains était dans un dénis si grand qu’ils avaient besoin que leur gouvernement les alerte. En-tout-cas, ça a réveillé la paranoïa d’un de mes voisins. Au petit matin, il a commencé à débiter des meubles de son jardin « en prévision de l’hiver » m’a-t-il dit. Peut-être a-t-il raison. Peut-être que c’est moi qui suis dans le déni.

12/08/2015

Depuis l’annonce, on entend au loin de plus en plus d’explosion. Il est impossible de savoir si le conflit s’intensifie ou s’il se rapproche de nous. Diverses atrocités nous arrivent des quelques personnes en transite par chez nous. Ils parlent de meurtre, de vol. Ils nous racontent que pour survivre les habitants des villes de leurs pays doivent en venir aux mesures les plus drastiques. Je ne suis pas sûr que leurs histoires de voiture enflammée ou de rideau en sang soit une bonne chose. Cela risque de participer à miner le moral des habitants restants ou à semer les graines d’un funeste projet pour d’autres. Je me suis rendu compte cependant que ces histoires m’affectent beaucoup moins que les autres. Peut-être est-ce dû à toutes ces années en étant juge. À force de présider les procès des pires raclures de l’humanité, il faut croire qu’on s’habitue à côtoyer l’horreur. Ou peut-être est-ce seulement l’effet des cachets.

14/08/2015

La première pénurie se fait ressentir, on a des tickets de rationnement pour subsister. Les bombardements se sont incroyablement augmentés. Certains quartiers sont gravement touchés, des équipes ont été formé pour chercher des survivants dans les décombres. Un avant-poste militaire a été également atteint par les bombes. Pas très loin, j’ai trouvé le corps d’un soldat. J’ai pris son arme à feu. Je devrais pouvoir me défendre. Peut-être aussi pouvoir attaquer. Non, je ne suis pas comme tous ces gens. Je crois en l’humain.

16/08/2015

Une petite économie a débuté sa formation au sein de la ville. En-tout-cas dans le centre-ville. La plupart des habitants se sont regroupés ici afin d’être plus proches des différentes des centres de l’armée et de rationnement. Je n'ai appris que dans la périphérie de la ville, là où l’armée est absente, des pillages ont lieu. Les cibles de ces larcins sont uniquement les appartements laissés à l’abandon par la population qui a fui plus loin.

J’ai commencé de mon côté à falsifier des documents, je générais ainsi un petit trafic qui me permet d’obtenir assez de tickets de rationnement. Pour l’instant, je ne manque de rien.

19/08/2015

Les combats font maintenant rage dans les alentours, les soldats de l’ennemi et les nôtres ne lâchent rien et se rendent coup pour coup. Les bombardements ont déjà détruit au moins en partie la plupart des immeubles. Maintenant, on ne sait juste pas de quel camp viennent les tirs. L’économie précaire de notre petite communauté a muté et n’est plus encadrée par l’armée. Les tickets de rationnement ne valent plus rien, les prix fluctuent sans cesse. On échange principalement les denrées de bases, mais également des armes. Il est devenu évident pour tous, même les plus pacifiques, qu’ils sont nécessaires de se défendre des attaques de pillards et des armées. Mon commerce ne peut plus me faire vivre. Je partirai ce soir en expédition dans de le quartier est, il me semble avoir vu quelques cibles faciles à piller. Un obus a touché la tour de communication, nos téléphones sont inutiles. De toute façon, nous n’avons même plus d’électricité pour les alimenter.

Joe à trouver des talkies-walkies afin que l’on puisse rester en contact. Sa femme a entendu dire que les pillages ont commencé à atteindre le centre-ville.

20/08/2015

J’étais mal à l’aise devant cette maison. Mais rapidement, un bruit d’explosion lointain me ramena à la réalité. Je tentai en un premier temps de forcer la porte d’entrée, en vain. Cependant, il me suffit de ramasser une brique sur le sol et de fracasser la vitre pour entrer. Je me sentis comme un hors-la-loi. Bien que ce fût nécessaire pour survivre, pénétrer dans cette demeure abandonnée me fit froid dans le dos. La maison était classique en tout point. Épargner par les bombardements et la guerre, la vie semblait suspendue. J’avais l’impression qu’à tout moment, la famille qui vivait ici pouvait rentrer d’une sortie ou d’une activité à l’extérieur, comme si elle n’avait jamais connu la guerre. Je me mis alors à fouiller la bâtisse à la recherche de denrées et éventuellement de médicament. Je ne suis pas malade, mais mieux vaut prévenir que guérir. Le frigo ne m’a été d’aucune utilité, sans électricité tout son contenu avait pourri. En revanche, la cave se montra bien plus généreuse, j’y trouva une dizaine de boîtes de conserve et un petit pot de miel. La maison n’avait aucun médicament utilisable à mon grand regret. Je décidai alors de fuir avec ce butin, il n’est pas prudent d’être dehors une fois que le soleil se lève. Sur le chemin du retour, j’ai l’impression d’être suivi, épié. Je dois faire attention, une menace rôde peut-être.

25/05/2015

Cela fait maintenant plusieurs jours que je « visite » des maisons abandonnées. Je trouve de quoi subvenir à mes besoins, et même un peu plus. Les pilleurs ne s’en prennent plus qu’au demeure vide, désormais certains ont décidé que c’était la loi du plus fort. Dans le but de me défendre, j’ai scellé toutes les fenêtres et barricader les portes de ma maison. J’ai fait l’inventaire de mes ressources, tout est en transposé dans une petite cache. Si c’est un pillard qui lit ces lignes, qui plus est celui qui m’a tué, tu peux aller te faire foutre pour que je te dise où elles sont. Tu ne trouveras rien dans ces lignes qui te serait utile.

La situation globale ne semble pas vraiment changer, les combats font toujours rage. Tout le monde passe ses journées à scruter le ciel à la recherche d’un avion chargé de lâcher de l’aide humanitaire, mais ce sont souvent les bombardiers qui rentrent dans nos champs de visions.

27/08/2015

Une bombe est tombée à côté de la maison. Tous les murs ont tremblé et j’ai bien cru que tout allait s’effondrer, mais au final tout va bien, seul le verre d’une fenêtre barricadée s’est brisé. Si au début, je fus soulagé, je me rendis vite compte que la bombe était tombée à côté de ma maison. Or, à côté de ma maison, c’est celle de Joe. Je sortis timidement la tête et vis effectivement des ruines à l’emplacement de son logis. Je sortis alors pour le chercher parmi les décombres. Je le trouvai assez facilement sous un tas de bois. Il doit sa survie au fait qu’il se trouvât à la cave au moment de l’explosion. Sa femme n’eut pas la même chance, nous ne l’avons pas trouvé dans les décombres. Après avoir raisonné Joe (celui-ci désirait continuer les recherches alors qu’aucun espoir de survie n’était permis pour sa compagne.), nous avons ramassé les ressources qui n’avaient pas été écrasées. Après cela, il est évidemment venu vivre avec moi. Nous avons décidé d’alterner les moments, où nous serons actifs. Je serai donc de corvée de collecte la nuit, tandis que lui géra le refuge de jour. Ça me fera du bien de me reposer sur quelqu’un par moment, je n’ai quasiment pas dormi depuis que tout à dégénéré.

31/08/2015

L’organisation que Joe et moi avons mise en place semble porter ses fruits. Je suis bien plus efficace dans la collecte de ressources quand je suis reposé. Je suis même d’attaque pour tenter d’aller dans l’hypermarché, des pillards ont eu élu domicile dedans, mais je devrais réussir à m’infiltrer pour voler quelques trucs. Joe est très affecté par la mort de sa femme, je pense que c’est bien qu’il reste à la maison et qu’ils vivent à la lumière du jour. Il a renforcé mes barricades et tente de fabriquer un réseau électrique à l’aide d’un groupe électrogène qui a survécu sous les ruines de sa maison. Si cela fonctionne, on sera peut-être en mesure de se chauffer cet hiver.

02/09/2015

Tout ne c’est pas passé comme prévu, j’ai réussi à rentrer dans le bâtiment. J’ai pu commencer à voler des ressources que les pillards n’ont pas jugé utile (matériaux, outils). Visiblement, pour eux, seules la nourriture et les armes ont de la valeur. Mais pendant que je commettais mon larcin, je fus surpris par l’un d’entre eux. Il n’avait pas d’arme, mais n’a pas hésité à se ruer sur moi. Je pris la fuite et m’extirpa du magasin. J’avais pour projet de le semer dans les ruelles, mais il ne lâchait rien. Après quelques minutes de courses, je me glissai dans un morceau d’obscurité. Mon poursuivant ne tardera pas à trouver ma cachette, mais il fut surpris de ne plus m’apercevoir au moment où il arriva à l’endroit où j’aurais dû me trouver. Je lui sautai alors dessus, l’étrangla avec le bras, et attendis qu’il ne bouge plus pour relâcher mon emprise. Je ne sais pas si je l’ai tué, en tout cas, il ne bougeait plus, et je n’avais pas le temps de vérifier s’il respirait. La bonne nouvelle, c’est qu’il n’avait pas eu le temps de déclenche l’alarme, je pus donc retourner à mon affaire. Au final, j’ai pu récupérer pas mal de matos et un fusil qui traînait sans doute celui du garde qui m’a pourchassé. S’il l’avait sur lui, j’étais mort. Je dois être plus prudent.

04/09/2015

Joe à confectionner un véritable petit bunker, la maison est très sécurisée. La cave, quant à elle, nous sert de poste de travail. Joe raccommode des vêtements ou répare les affaires qui pourraient nous servir ou avoir de la valeur. Nous avons appris que certaines nuits, des gens se regroupent pour s’échanger des choses dans ce qui était le conservatoire. C’est un peu loin, mais cette importante distance est compensée par l’absence de risque. Si on se fait assez discret, l’accès est simple.

J’ai également appris de mon voisin diurne que ce que je faisais pousser n’était pas de simples betteraves, mais des betteraves sucrières. Pour l’instant, nos réserves de nourritures ne sont pas alarmantes. Nous les laisserons donc en terre. Et si je parviens à nous dégoter un alambic, nous pourrions produire de l’alcool à échanger. Cette denrée est énormément recherchée en ville. Certains s’en servent pour s’aider à survivre, d’autre pour s’aider à mourir.

Je ne l’ai pas dit à Joe. Lors de l’une de mes expéditions, j’ai trouvé le collier de Félix dans un feu de camp de fortune. Je doute de le revoir un jour. Dommage, c’était un super chat, il méritait mieux.

07/09/2015

En farfouillant pour trouver de la ficelle, je suis tombé sur une gamine. Elle ne semblait pas faire partie d’un groupe de voleur. Je sais qu’ils ne prennent que des gens qui leur sont utiles et tuent les autres, mais il aurait très bien pu en faire une sorte d’appât. En-tout-cas, je décidai de l’approcher. Elle était tapie dans le coin d’un bâtiment en ruine. Ses dents calquaient frénétiquement et semblaient chercher une nourriture invisible. Ses vêtements étaient maculés de résidus noirs. Il n’était pas possible de savoir s'il s’agissait de saleté ou de cendre. De toute façon, je ne saurais dire ce qui serait le pire. Il y en avait tant qu’on ne pouvait deviner la vraie couleur du pompon de son bonnet. Ses yeux roulaient d’un bout à l’autre du décor, scrutant l’horizon sans but. Face à cette scène d’horreur. Je ne pus me résoudre à l’abandonner à son sort. Je décidai de la prendre avec moi, bien que je sois pour elle un parfait inconnu, elle n’opposa aucune résistante.

08/09/2015

Au début, Joe n’était pas très content de me voir rapporter une nouvelle bouche à nourrir, mais il a rapidement baissé sa garde et est revenu à la raison. Je ne peux pas lui en vouloir, ici son comportement est devenu la norme pour survivre. La petite à avaler sa nourriture puis s’est effondré de fatigue. Elle n’a pas dit un seul mot depuis que je l’ai trouvé. On l’a déplacé dans un petit coin de la cave. Ce n’est pas très accueillant, mais elle sera en sécurité. On a laissé des vêtements propres à côté d’elle. Quand elle se réveillera, elle pourra se changer. Ça serait un miracle qu’ils soient à sa taille, mais c’est toujours mieux que rien.

10/09/2015

Je saigne, j’étais en train de briser la porte d’une armoire quand j’ai reçu une balle dans le bras. Je ne l’ai pas senti. J’ai agi instinctivement et fuis sans savoir où aller. Ils me prirent en chasse. Je sentis des picotements dans mon bras. Un regard pour voir mes agresseurs, je vis deux hommes lourdement armés. Tout cet attirail indique qu’ils n’étaient pas là pour chercher de quoi subsister, mais bel et bien pour se battre, voir même tuer. Leurs fardeau a été une vrai opportunité pour filer à l’anglaise. Je suis actuellement caché à l’étage d’un ancien bureau. Je ne saigne plus, mais ma blessure me fait de plus en plus mal. J’ignore où je suis et je ne sais pas si je suis traqué. Et si ces tueurs en avaient après moi ? Et si c’étaient des gars de l’hypermarché ? Joe et la gamine sont peut-être en danger ! Je dois bouger, je dois les rejoindre ! Vite !

12/09/2015

Ils ne sont pas très loin, je les ai entendus. Ça fait trois jours qu’ils me traquent. Ils veulent me tuer. Je ne fais que fuir depuis qu’ils sont derrière moi, j’ai à peine trouvé à boire. Mon estomac est noué, creux et douloureux. Je n’ai pas fermé l’œil depuis si longtemps, mes forces s’amenuisent. Et puis il y a ce bras, ce foutu bras qui fait de plus en plus mal. Il commence à puer et à être difficile à bouger. Je ne peux plus écrire, je dois fuir.

66/66/666

Ils m’ont tué, ou bien, je les ai tuées, je ne sais plus. Je ne pouvais plus fuir. Je leur ai tendu une embuscade. J’ai attrapé un bout de verre et me suis caché, les sachant sur mes talons. Ils se sont séparés. Grave erreur. L’un deux passèrent à côté de moi, il était équipé d’une batte de base transpercée de clous. Je l’ai attaqué par-derrière, je lui ai tranché la gorge et asséner une série de coups dans le ventre. Je crois qu’il s’est étouffé dans son propre sang. J’ai ramassé sa batte et me suis faufilé derrière son complice. Je lui ai éclaté le crâne à grand coup de batte. Il ne restait de son crâne qu’une bouillie informe. Un rire incontrôlable me saisit. Et ce, pendant 10 minutes. Maintenant, je me cherche un coin pour mourir. Je suis en train de pourrir sur place. Je vais essayer de me rapprocher de la maison. Joe ramassera sur moi les armes que j’ai prises à mes agresseurs, ou victimes, je ne sais pas, personne ne peut affirmer savoir.

20/09/2015

Je n’ai quasiment pas de souvenir de ce qui s’est passé, mais je suis en vie. Mon dernier souvenir, c’est le sol d’une ruelle qui se rapproche dangereusement de mon front. Joe était parti à ma recherche, c’est lui qui m’a sauvé. Apparemment, je n’étais pas très loin de la maison, une chance qu’il m’ait trouvé, une seconde de plus aurait pu m’être fatale. Il a désinfecté mon bras, il est moins douloureux et a arrêté de puer. Mais surtout, une nouvelle formidable est parvenue à Joe, les soldats de l’ONU sont en route pour stopper la guerre ! Ce n’est qu’une question de temps avant que tout rentre dans l’ordre.

21/09/2015

La petite va beaucoup mieux. Joe m’a dit qu’elle s’est remise à parler deux jours après mon départ. Ses parents ont été tués par des soldats qui en voulaient leurs nourritures. La pauvre à errer dans les ruines avant que la faim ne la rende à moitié folle jusqu’à ce que je la trouve. Je me suis occupé d’elle ce matin. Elle m’a remercié de l’avoir sauvé et nous avons joué à la marelle ensemble. Je n’ai jamais été très à l’aise, mais j’ai le sentiment d’avoir correctement agi en allant la secourir.

23/09/201

On a pris une décision, la paix étant imminente. Joe et moi dépenserons nos économies. Je vais aller à ce fameux point d’échange équipé de nos betteraves. On devrait pouvoir manger des aliments de meilleures qualités.

24/09/2015

Nous avons fait un petit festin, avec de la vraie viande, et d’origine animale à coup sûr. J’avais oublié la saveur incroyable de cela. La petite est surexcitée, je lui ai trouvé une voiture télécommandée. Elle court partout en la poursuivant dans la maison. L’abri est des plus bruyants, mais au diable le repos, ça fait du bien de le voir remplie de vie.

28/09/2015

Ils sont arrivés, ils sont à l’autre bout de la ville. Leurs forces ont rasé les restes d’armées qui s’entretuaient et mis fin au conflit. Ils distribuent des vivres et de l’espoir dans de grands camions humanitaires. Nous partons immédiatement en direction de leur emplacement. Maintenant, la vie va reprendre. La gamine va rejoindre un orphelinat, elle reprendra le chemin de l’école. Elle vivra avec le fardeau de cette épreuve, le souvenir de toutes ces souffrances. Bien que je lui souhaite le contraire, je ne pensai pas qu’elle puisse se débarrasser de toutes les séquelles infligées par son passé. 

Joe quant à lui va sans doute rester en ville, il n’a jamais aimé le changement. Il enterra sa femme et refera sûrement sa vie. Peut-être même qu’il tentera d’adopter la gamine. Il accumulera les cauchemars au cours de sa vie, jusqu’à qu’il décide d’y mettre un terme.

Moi, je partirais loin. J’irai le plus loin possible de ce pays. Le plus loin possible de cette créature qui décide alors qu’il a réussi à mettre un pied sur la lune que la violence est la meilleure des solutions. Je prendrais un voilier et irai vivre au point Némo, à l’opposé de la vie humaine et de ses vices. Je laisserai derrière moi cette expérience, cette maison, ces crimes, ces privations. J’abandonnerais tout de cette vie, et cela commence par jeter se fout un carnet. Vous aviez raison docteur, il m’a permis de mieux gérer mes angoisses, et couplé avec un sevrage forcé de mes cachets en raison de pénurie, m’as permis de me débarrasser de mes vieux démons. Cependant, leurs remplaçants ne partiront pas avec du papier et un peu d’encre.